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Climat: entreprises et finance en font trop peu pour lutter contre la déforestation

Les grosses entreprises et institutions financières mondiales n’agissent pas, ou pas assez, pour lutter contre la déforestation liée à la production et la consommation d’huile de palme, de soja, de viande de bœuf, de cuir, de bois et de papier, dénonce une ONG britannique ce jeudi.
par Coralie Schaub
publié le 13 janvier 2022 à 10h22

En novembre, à la COP26 sur le climat de Glasgow, en Ecosse, gouvernements, entreprises et institutions financières ont promis, la main sur le cœur, de lutter contre la déforestation, responsable d’environ 15 % des émissions de gaz à effet de serre (GES). Las, ces engagements sont sapés par l’inaction des grosses entreprises et institutions financières en la matière, dénonce ce jeudi l’ONG britannique Global Canopy, dans la dernière édition de son rapport annuel, qui analyse les promesses des 350 plus grosses sociétés produisant, utilisant ou commercialisant les six principales matières premières responsables de la déforestation (huile de palme, soja, viande de bœuf, cuir, bois et papier) et de 150 institutions qui les financent.

«Chaînes d’approvisionnement du soja, du bœuf et du cuir»

Selon ce rapport, un tiers des entreprises étudiées n’ont pas mis en place de politique permettant d’assurer que leurs produits ne sont pas responsables de déforestation. Parmi elles, les géants français de l’agroalimentaire Lactalis (marques Président, Salakis, Galbani, la Laitière…), Savencia (Saint Agur, le Rustique, Etorki, Saint Môret, Tartare…) ou Fleury Michon.

Par ailleurs, parmi les entreprises qui ont pris des engagements, «beaucoup ne parviennent pas à fournir de preuves de la façon dont elles les mettent en œuvre, en particulier pour les chaînes d’approvisionnement du soja, du bœuf et du cuir», indique le rapport. Le soja peut être un «ingrédient caché» de produits tels que la viande, le poisson, les produits laitiers ou les œufs, car il est couramment utilisé dans l’alimentation animale.

De quoi nuire à la lutte contre le changement climatique, puisque «si la déforestation dans les tropiques était un pays, ce serait la troisième source d’émissions de CO2 au monde après la Chine et les Etats-Unis», rappelle le rapport. De quoi nuire, aussi, à la biodiversité, aux droits des populations locales. Ou encore aux entreprises elles-mêmes, car, selon Global Canopy, «en causant dégâts climatiques et perte de biodiversité, en affectant l’approvisionnement en eau, la déforestation détériore les conditions permettant de cultiver les matières premières agricoles, ce qui a un impact sur la production et les prix».

«Mesures contraignantes et devoir de rendre des comptes»

De leur côté, les institutions financières injectent au total 5 500 milliards de dollars (4 800 milliards d’euros) dans les 350 entreprises étudiées, «mais n’utilisent pas ce levier pour les inciter à changer de pratiques», constate le rapport.

Près des trois quarts de ces institutions n’ont pas adopté de politique permettant d’éviter les risques de déforestation induits par les compagnies qu’elles financent. Parmi celles-ci figurent les français BPCE, Crédit mutuel, CIC et Equitable Holdings.

Pour Global Canopy, «seules des mesures contraignantes et le devoir de rendre des comptes permettront de faire bouger le marché à l’échelle nécessaire». L’ONG en appelle à la législation. En novembre, la Commission européenne a publié une proposition législative visant à «éviter ou minimiser la mise sur le marché de l’UE de produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts». Dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne qui a débuté le 1er janvier, la France a placé cette proposition de loi européenne contre la déforestation importée sur la liste de ses priorités.

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